RASSEMBLEMENT REGIONAL 2011
« La prison : machine à récidive ? ou bien qui restaure et guérit ? »
A l’occasion de leur rassemblement régional annuel à la Maison Diocésaine Saint Vaast, à ARRAS au début du mois d’octobre, plusieurs dizaines d’adhérents de l’ACAT venus du Nord, du Pas de Calais et de la Picardie se sont interrogés sur l’impact humain des peines d’emprisonnement en France et à l’étranger (en particulier en Afrique de l’Ouest). Cet impact concerne bien évidemment le condamné qui ne comprend pas ou difficilement la portée réelle de ses actes mais aussi sa famille qui partage involontairement cette condamnation et en subit les conséquences négatives ( impact sur la vie de couple, l’éducation des enfants, la vie quotidienne économiquement et socialement plus compliquée…). Le regard des autres condamne aussi souvent la famille, son conjoint ses enfants et leur fait porter injustement un fardeau trop lourd. Après la sentence prononcée, la victime et sa famille sont elles aussi oubliées et laissées à leurs blessures profondes, à leurs souffrances (souvent identiques à celles de la famille du condamné), à leurs questionnements auxquels le procès n’a pas répondu: « ma fille ou mon fils sont morts et lui continue à vivre sans remords, sans un regard, sans un pardon ».
Des hommes et femmes, des bénévoles ou des salariés au sein d’associations ou d’institutions internationales, observent, aident sur le terrain ceux qui souffrent de chaque côté du mur de la prison. Les adhérents de l’ACAT présents lors du rassemblement régional ont ainsi écoutés des spécialistes venus partager leurs expériences et leur proposer des éléments de réponse et de proposition d’action.
Se référant aux textes bibliques et à de nombreuses études, le Pasteur Christophe HAHLING, Président de la CEDEF (Commission d'entraide auprès des détenus et de leurs familles) a développé la notion de justice dans la bible et sa différence avec ce que l’on entend par la justice dans la société actuelle. On parle de « justice de rétribution » mais une autre justice existe : la justice restaurative. Ancien aumônier; membre du groupe de travail « justice restaurative » de la Fédération Protestante de France, Christophe HAHLING a détaillé le contenu et le mode d’emploi de cette justice restaurative définie par le Conseil Économique et Social de l’ONU comme un « processus dans lequel la victime et le délinquant et, lorsqu’il y a lieu, toute autre personne ou tout autre membre de la communauté subissant les conséquences d’une infraction participent ensemble activement à la résolution des problèmes découlant de cette infraction, généralement avec l’aide d’un facilitateur ».
Déjà mise en place depuis plusieurs années dans des pays anglo-saxons et plus près de chez nous, chez nos voisins belges, la justice restaurative permet de réduire sensiblement la récidive et remet l’homme au centre des préoccupations. La justice restaurative aide en effet chacun à reprendre la parole et à écouter la souffrance des individus.
Derrière les murs, il y a des êtres humains capables de s’exprimer de manière remarquable sur ce qu’ils ressentent a démontré Mme Marguerite RODENSTEIN, responsable d’un atelier d’écriture à la maison d’arrêt de Colmar. L’exposition « Derrière les murs, des êtres humains… » installée à l’entrée de la salle de réunion pendant le temps de la rencontre a parfaitement illustré la justesse de l’action de bénévoles compétents au sein d’une prison.
Mme Nicole COFFIN « Amitié sans visage » du Secours Catholique, a fait part de son expérience de 18 années de relations épistolaires avec des détenus qui ont besoin de sentir qu’ils comptent encore pour quelqu’un qui est de l’autre côté des murs.
Avant la projection du film : « Au-delà des murs » Madame Marie-Françoise PETIT, membre du conseil d’Administration de l’association PRSF (PRisonniers Sans Frontières), responsable-Pays pour le Bénin et magistrat honoraire a décrit l’évolution de la notion de justice dans ce pays africain et le fonctionnement des prisons au sein même desquelles PRSF intervient par une activité solidaire franco- africaine qui redonne espoir et dignité aux prisonniers et leur famille, et contribue à améliorer leurs conditions de détention .
Les membres de l’ACAT ont terminé leur rencontre en adoptant le vœu que soit mise en place la « justice restaurative » en France et ont souhaité à cet effet que les instances nationales concernées donnent une suite positive aux propositions contenues dans le rapport rédigé sur ce sujet en 2007 par le groupe de travail du Conseil national de l’aide aux victimes.